la petite chambre à la mer (par Léa)

J’étais moi-même étonnée du premier endroit qui m’a traversé l’esprit. Cela remonte à il y a fort longtemps et n’est pas justifié par la remémoration d’un bon souvenir qui aurait marqué mon enfance. Alors commençons. Nous allions quelques week-ends avec mon père et ma belle-mère dans un appartement à Sainte-Cécile traits de la mère. Je me rappelle encore de l’odeur étrange qui flottait dans ce vieil appart, un mélange de renfermé et de poussière comme ont l’odeur des vieilles choses, mais il est avec une odeur de sel comme si il y avait eu là une criée la veille. La porte d’entrée donnée sur un couloir qui distribuait 3 pièces : la pièce à vivre avec cuisine, la salle de bain et une petite chambre. La première fois que je suis rentrée dans ce couloir, j’ai tout de suite vu accroché sur le mur d’en face, une petite étagère avec une bonne cinquantaine de mini figurines. Mon esprit d’enfant se voyait déjà jouer avec elles durant des heures. Des scénarios se mettaient en place, avec de l’action, de l’amour, des moments tragiques comme dans un film américain à gros budget. Je m’approchais de celle-ci, les yeux pleins de lueur d’espoir que finalement, ce week-end n’allait pas être qu’ennui. Une main sur mon épaule m’arrêta de suite.
–« Ah ça, tu ne peux pas y toucher Léa, ce sont les jouets d’Édouard dont mes parents collection. »
Et voilà, nous y sommes.
Ils me montrent la petite chambre où j’allais passer mon week-end. L’ancienne chambre d’Édouard, donc. Au mur, des posters de Tintin et Spirou dont les couleurs faisaient contraste avec l’ensemble papier peint, sûrement à la mode dans les années 80 au même titre que Claude François ou les bigoudis. Une petite étagère présentait les Lego Star Wars comme s’ils étaient en exposition au public. Lego que je ne pouvais bien évidemment pas toucher non plus. Une fois, j’avais eu le droit de prendre un de ces livres, après 10 minutes d’explications sur la manière dont il ne fallait pas trop l’ouvrir, pour ne pas abîmer la reliure.
Le lit, j’avais le droit d’y toucher, yes ! Ma première nuit là-bas, j’ai eu du mal à trouver le sommeil. Je ne comprenais pas pourquoi j’étais là, dans la chambre de quelqu’un d’autre, dans ses draps, avec ses jouets. On aurait pu croire qu’Édouard était mort, une histoire tragique à la Grégory dont les parents n’arrivent pas à se séparer des affaires. Mais non, Édouard va bien, Édouard est grand et il vit sa vie d’adulte tandis qu’on me demande à moi de ne pas prendre sa place. J’ai détesté dormir dans cet endroit, la simple évocation d’un week-end à la mère me donnait des crampes abdominales.
« Ah les gamins, c’est jamais content, même un week-end au soleil à la mer, ça leur va pas !
Édouard, lui, il adorait ça. »